Laissez les petites filles…
La semaine dernière, j’étais chez le médecin. Ces jours-ci ne sont pas toujours faciles, et même si je n’aime pas tellement ça, dernièrement, je me suis résignée à demander une petite aide comprimée pour passer le cap.
C’est pas ma méthode de soin favorite. Je l’ai toujours évitée autant que possible. Mais ça, on en parle dans un prochain article.
Ce n’est pas pour ça que je vous écris.
Ce matin, la salle d’attente était remplie de mamans et d’enfants (c’est normal, on était mercredi).
Et surtout, de petites filles.
L’une d’elle est venue vers moi – j’ai une tête qui attire les enfants, je crois qu’ils doivent voir que je les aime bien, que mon âge mental approche parfois du leur, quand il s’agit de jouer, d’imaginer, de créer, de dessiner. Moi aussi je peux avoir cinq ans.
La petite avait un livre à la main. Et elle voulait me le lire. Elle était encore minuscule, avec un visage en amande et plein de petites nattes. Je lui ai demandé quel âge elle avait, et elle m’a dit : quatre ans. Et là, j’ai vu le problème dans ses yeux. Elle ne savait évidemment pas encore lire. Alors, une autre petite fille, avec des paillettes sur les pommettes, un peu plus grande que l’autre, enfant d’une autre maman occupée à surveiller un petit frère, s’est approchée. Et elle a proposé à la puce de quatre ans de lire pour elle.
Déjà, à ce stade, j’étais aux anges. Des petites filles choupinettes, une courageuse proposition de lecture, des enfants qui aiment les livres, qui ne se connaissent pas mais s’entraident. De quoi retrouver foi en ce monde, carrément.
Et là, la petite puce, du haut de ses quatre ans, a demandé fermement à la grande : « Dis-moi à l’oreille ce qui est écrit pour que je puisse le lire moi-même ». Ce que la grande a fait. Elles se sont lancées toutes les deux, l’une aidant l’autre, la plus petite répétant les phases murmurées par la plus grande.
J’ai trouvé ça tellement incroyable, ces deux petites filles qui ne se connaissaient pas et qui me lisaient cette histoire, à moi, une adulte inconnue qu’elles n’avaient pas hésité à aller voir. Tant de détermination, de curiosité, d’empathie, d’affirmation de soi déjà ! Un monde de possibilités devant elles.
Et puis, j’ai relevé la tête. Dans la salle, surveillant les enfants : des femmes, mains sur des poussettes, debout derrière un bébé vagabond, consolant, mouchant… Pas un papa ce matin là, que des mamans.
Celles qui sont libres le mercredi et s’occupent des autres. Celles qui sont là pour guérir les bobos, moucher les pleurs, penser aux vaccins. Celles qui ralentissent leur carrière ou la mettent entre parenthèse. Pourtant, certainement pas moins intelligentes et déterminées que leurs filles.
Et je me suis dis : « Comment ça se fait ? Qu’est-ce qui se passe, entre cette innocence pleine de détermination, et l’âge adulte ? Comment ça se fait que les femmes, malgré toutes leurs évidentes capacités (dont celle de fabriquer des humains, pas des moindres), se retrouvent en retrait, moins bien payées, moins considérées ? »
C’est encore pas si simple d’être une fille – même si la France n’est pas l’Afghanistan et de loin, et même si on n’est plus en 1950.









Les articles précédents sont accessibles en dessous.
N’oubliez pas de vous abonner plus bas pour recevoir les nouveaux articles dès leur parution ! Votre abonnement me permet de communiquer mon travail. par email et de moins dépendre des algorithmes des réseaux, qui ont tendance à invisibiliser les sujets des violences faites aux femmes.


