Cette semaine, en prévision des grandes vacances, j’ai été m’acheter un maillot de bain.

Je dois avouer que cette perspective n’est pas mon moment de l’année préféré (mon abonnement à la salle de sport inutilisé, je l’ai regretté au premier coup d’œil dans la glace de la cabine d’essayage). J’ai réalisé que même si je faisais du jogging et mangeais uniquement des haricots verts tous les jours pendant la semaine qu’il me reste avant de partir, il serait trop tard pour arriver à l’objectif du corps sinon fantastique mais du moins acceptable que je m’étais fixé au Nouvel An à l’heure des bonnes résolutions.

C’est que pour être prête pour la plage, je ressens comme beaucoup de femmes une certaine pression…

Les standards irréalisables dont nous sommes bombardées en permanence, dans les magazines et les publicités, placent la barre très haut ! Tenez, juste pour le mettre, ce fameux maillot, il faut répondre à un nombre d’exigences tel, que même les mannequins, dont on retouche les photos, n’y parviennent pas. La minceur n’étant pas un des moindres canons de beauté mis en avant dans notre société…

Caroline Gaujour

Cependant les contraintes imposées au corps féminin ne s’arrêtent pas au contrôle de son poids…

Pour pouvoir se glisser dans un bikini, il faut passer par une série d’épreuves dignes des travaux d’Hercule. Être fine ne suffit plus, il faut aussi avoir des muscles galbés et des cuisses sans capitons (challenge, là encore, car 90% des femmes en ont !). Moi, j’ai l’impression que tous ces complexes qu’on me refile et que j’essaie en vain de gommer à coups de rouler-palper et autres massages lymphatiques font bien marcher l’industrie cosmétique, mais cela ne m’empêche pas de regarder mes fesses restées grumeleuses d’un air circonspect.

Caroline Gaujour

Et cela ne s’arrête pas là ! Un corps acceptable est aussi un corps… sans poils ! Le corps féminin « idéal » est aussi imberbe. Cela ne date pas d’hier, ni de notre civilisation, puisqu’en fait les égyptiennes et les romaines s’épilaient déjà. Problème : un poil, c’est dur à éliminer (c’est tenace. Ça repousse !). Tout un tas de techniques, plus ou moins effectives, ont été inventées pour s’en débarrasser – techniques dont certaines devraient être interdites par la convention de Genève.

Caroline Gaujour

Je ne mentionne même pas le fait qu’il faille aussi être manucurée et pédicurée – dans une couleur tendance, s’il-vous-plait.

Enfin, puisqu’on parle de tendance, il faudra enfin se garder d’enfiler n’importe quel maillot de bain. Toute une floppée de magazines sont là pour nous guider dans nos choix, en fonction de notre morphologie, de notre âge, de notre destination, de notre signe du zodiaque et de notre groupe sanguin. Malheur au fashion faux-pas. On le sait, il faut être « magnifaïque ».

Caroline Gaujour

Bref, être belle en maillot, cela demande tellement d’efforts, d’investissement et parfois de souffrance – comme dans « épilation à la cire » ou bien « cours de CrossFit » – que je me demande comment il est possible que, comme tant de femmes, je continue à jouer le jeu.

 

Car ce qui est troublant dans toute cette histoire, c’est que personne ne me force à me plier aux canons de beauté actuels…

Je m’y soumets de mon plein gré, même si je sais qu’au fond, cela reste un peu vain et ne me rend pas plus heureuse, bien au contraire ! Me regarder dans la glace en constatant que je suis loin de l’idéal que je me suis représenté, et être consciente qu’avec le temps, cet idéal m’échappera de plus en plus, est une expérience dévalorisante et même douloureuse. Alors pourquoi est-ce que j’accepte quand même de la subir ? Ne serait-il de m’accepter telle que je suis ?

Si je ne le fais pas, c’est sûrement parce que je me sens en danger. Celui de ne plus être intégrée si je ne colle plus à la norme, dans une société pour laquelle l’apparence n’est plus seulement un gage esthétique mais aussi moral (les valeurs associées à la minceur, par exemple, sont positives, quand celles associées au surpoids sont au contraire négatives).

Alors que faire ? Brûler son soutien-gorge ? Avoir du poil aux jambes pour montrer sa résistance aux diktats ? Peut-être essayer de poser un regard bienveillant sur soi et sur les autres… et transmettre ce message à nos filles :

Caroline Gaujour

Retrouvez mes articles sur le Huffington Post !